Prescription autonome par l'infirmier : une révolution encadrée par le législateur

L’adoption de la loi n°2025-581 relative à la profession d’infirmier, promulguée le 27 juin 2025, constitue une étape décisive dans l’évolution du droit de la santé.

Pour la première fois, le législateur consacre un véritable statut législatif à l’infirmier, reconnaissant formellement son rôle dans l’organisation des soins.

Au cœur de cette réforme, l’élargissement des compétences prescriptrices.

Cette autonomie nouvelle, saluée par la profession, demeure toutefois encadrée par des textes réglementaires et doit s’exercer dans le strict respect des règles déontologiques.

Une reconnaissance législative attendue

Jusqu’à présent, la prescription par l’infirmier reposait sur des habilitations limitées, souvent méconnues et parfois contestées, qui n’offraient pas une sécurité juridique suffisante aux infirmiers, en particulier aux professionnels libéraux.

La loi de 2025 modifie profondément cette situation en inscrivant dans le Code de la santé publique la consultation infirmière et le diagnostic infirmier comme actes relevant du rôle propre de la profession.

En pratique, ce nouveau statut prend la forme d’une modification de l’article L.4311-1.-I du Code de la santé publique, désormais en partie rédigé ainsi : « L'infirmier exerce son activité, dans le respect du code de déontologie, dans le cadre de son rôle propre ou sur prescription et en coordination avec les autres professionnels de santé.

Dans l'exercice de sa profession, l'infirmier entreprend, réalise, organise et évalue les soins infirmiers. Il effectue des consultations infirmières et pose un diagnostic infirmier. Il prescrit les produits de santé et les examens complémentaires nécessaires à l'exercice de sa profession ».

Un pouvoir prescripteur inédit, mais limité

La principale innovation de la loi réside donc dans la possibilité pour les infirmiers de prescrire, de manière autonome, certains produits de santé et examens, sans intervention préalable d’un médecin.

La liste des produits concernés sera fixée par arrêté ministériel, sur avis de la Haute Autorité de Santé et de l’Académie nationale de médecine.

Il ne s’agit toutefois pas d’une extension illimitée du droit de prescription, car les molécules complexes ou à haut risque demeurent réservées aux médecins. L’objectif ici est de permettre aux infirmiers, notamment libéraux, de répondre plus efficacement aux besoins courants des patients, en particulier en matière de suivi à domicile.

Concrètement, un infirmier pourra prescrire un pansement spécifique ou renouveler un dispositif médical sans solliciter systématiquement un médecin traitant. Un véritable gain de temps pour le patient et un allègement du parcours de soins.

Responsabilités renforcées et encadrement déontologique

L’extension des compétences s’accompagne d’une responsabilité accrue, puisqu’en prescrivant de manière autonome, l’infirmier engage sa responsabilité professionnelle et doit respecter les principes fixés par le Code de déontologie infirmier.

La prescription doit en tout état de cause toujours être adaptée à l’état du patient, scientifiquement justifiée et consignée dans le dossier médical partagé.

Un infirmier qui par exemple renouvelle une prescription de matériel de perfusion devra vérifier non seulement la pertinence du dispositif, mais aussi son inscription sur la liste des produits remboursables par l’Assurance maladie.

Une réforme à consolider par les textes d’application

Si la loi de juin 2025 constitue une avancée historique, son effectivité dépendra largement des décrets et arrêtés d’application. Ceux-ci devront préciser le périmètre exact des actes et produits concernés, définir les conditions de remboursement par l’Assurance maladie et encadrer la collaboration entre infirmiers et médecins.